Qu'advient-il de l'économie lorsqu'elle est pensée, inventée, et rêvée par les artistes ? On le sait peu, mais nombreux furent lceux qui, de la fin du XIXe siècle jusqu'à aujourd'hui, se firent un temps économistes, allant jusqu'à rédiger de véritables traités dont l'ambition affichée était de renouveler la discipline de fond en comble.
Qu'ils aient suivi une formation universitaire en économie (tels Vassily Kandinsky ou Robert Filliou), construit leur conception théorique de l'art en dialogue avec des économistes (comme William Morris ou Joseph Beuys), ou élaboré un système théorique à part entière (à l'instar d'Asger Jorn ou d'Isidore Isou), ces artistes nous livrent une vision riche et singulière, tant sur la pensée économique de leur temps que sur les enjeux d'aujourd'hui. Valeur, travail, monnaie et capitalisme - autant de thèmes scrutés et revisités par ces textes, dont le présent ouvrage se propose de faire l'anthologie.
Avec humour ou sérieux, érudition ou provocation, ces essais font de l'expérience de l'art un laboratoire théorique et pratique pour repenser l'économie dans son ensemble, aspirant à rien de moins, chez Isou par exemple, qu'à provoquer « un bouleversement capital, une transformation fondamentale du système monétaire et de la structure bancaire du monde entier ». En réunissant ces « propositions », modestes ou non, souvent méconnues, parfois traduites pour la première fois en français, l'ouvrage propose la généalogie d'une forme paradoxale - un traité d'économie écrit par un non-économiste -, et en expose les limites et la pertinence pour penser l'art et l'économie aujourd'hui.
Pour un artiste comme Raphaël Zarka, le skateboard est avant tout une affaire de formes. Formes du repos, formes du mouvement, elles parcourent sourdement l'histoire de l'art et des sciences, de Galilée à Robert Morris. L'architecture urbaine, mais aussi les modules des skateparks, leur font étrangement écho.
Quant à la pratique du skateboard, comme le montre La Conjonction interdite (2003), elle revient toujours à opérer une sorte de « montage » parmi la diversité de matières et de formes offertes par la ville, en dynamisant ou en déstabilisant les structures conçues pour le repos et le confort, au point d'en inverser les fonctions et le sens.
La Conjonction interdite est en quelque sorte une introduction à la pratique du skateboard. L'auteur a cherché à décrire le skateboard définissant sa place parmi la diversité des jeux et des manières de jouer.
Le skateboard (et plus généralement les sports dits « de glisse »), les jeux et les manières de jouer, tout comme les pratiques artistiques d'ailleurs, se sont considérablement étendus et complexifiés au cours de ces cinquante dernières années. Dans une position qui n'est pas sans rappeler l'intérêt d'artistes tels que Dan Graham ou Robert Smithson pour les cultures populaires, Raphaël Zarka définit ici les spécificités de cette pratique tout en décrivant les relations particulières qu'elle entretient avec la ville et certains de ses espaces.
Contrairement à la plus grande partie des terrains de jeux ou de sports, les différents espaces fabriqués pour le skateboard ne sont jamais abstraits. La majorité des skateparks actuels, avec leurs mélanges de courbes, de plans inclinés et de volumes parallélépipédiques, synthétisent l'espace d'origine du skateboard, l'océan, et son lieu de naissance, la ville moderne. Accompagné de nombreux documents photographiques, ce texte est une visite guidée des espaces du skateboard. L'auteur en dresse une sorte de typologie formelle tout en constituant son archéologie, des appareils de mécanique galiléenne à l'histoire de la sculpture minimaliste dont les skateurs seraient les héritiers.
«Depuis une dizaine d'années, je remarque avec stupéfaction combien les oeuvres d'art public sont fréquemment documentées dans les magazines et les vidéos de skate. Les skateurs les utilisent comme support de leurs figures. Les passants, le public, la critique et l'histoire de l'art jugent les oeuvres selon des critères esthétiques et conceptuels (la beauté d'une forme ou l'intérêt d'une idée). Ceux des skateurs sont mécaniques?: tout l'intérêt d'une sculpture dans l'espace public tient à la variété des mouvements qu'elle suggère. Plus irrévérencieuse que vandale, cette pratique de l'oeuvre d'art souligne le dynamisme explicite de tout un pan de la sculpture moderne. Sur des sculptures le plus souvent abstraites et géométriques, les skateurs rendent effective l'idée de mouvement littéralement mise en oeuvre par les artistes.» Raphaël Zarka Cet ouvrage est publié avec le soutien du Centre national des arts plastiques (aide à l'édition), du ministère de la Culture et de la Communication, du Grand Café, centre d'art contemporain de la ville de Saint-Nazaire,du FRAC Franche-Comté, de la galerie Michel Rein et de Carhartt.