L'année du singe se présente à la fois comme un récit de voyage à travers la Californie, l'Arizona, le Portugal et le Kentucky, un fantastique carnet de rêves et de conversations imaginaires, et une méditation lucide sur le passage du temps, le deuil et la compassion. Au fil de ses déambulations solitaires, Patti Smith déroule l'année 2016, l'année charnière de ses soixante-dix ans. Le souvenir des lieux se mêle au paysage intérieur de l'artiste, et tout ce qu'elle a vu, rêvé ou lu, coexiste dans ce pays des merveilles tout personnel. Elle croise ainsi un cortège de fantômes aimés et admirés, parmi lesquels Roberto bolano, Jerry Garcia, mais aussi, et surtout, deux amis chers au crépuscule de leur vie : le dramaturge Sam Shepard et le producteur de musique Sandy Pearlman.Patti Smith tisse avec pudeur et mélancolie la toile de cette année singulière marquée par des bouleversements intimes et politiques, sans jamais s'abandonner à l'apitoiement ni au désespoir. Elle célèbre au contraire l'art et les pouvoirs de l'imagination, offre sa sagesse optimiste et sa finesse d'esprit, rappelant, s'il en était besoin, qu'elle est l'une des créatrices les plus talentueuses de notre temps.
C'était l'été de la mort de Coltrane, l'été de l'amour et des émeutes, quand une rencontre fortuite à Brooklyn guida deux jeunes gens dans la vie de bohème, sur la voie de l'art. Patti Smith et Robert Mapplethorpe avaient vingt ans ; elle deviendrait poète et performeuse, il serait photographe. À cette époque d'intense créativité, les univers de la poésie, du rock and roll et du sexe s'entrechoquent. Le couple fréquente la cour d'Andy Warhol, intègre au Chelsea Hotel une communauté d'artistes et de marginaux hauts en couleur, croise Allen Ginsberg, Janis Joplin, Lou Reed.
Just Kids commence comme une histoire d'amour et finit comme une élégie, brossant un inoubliable instantané du New York des années 1960-1970. Avec pudeur et émotion, Patti Smith retrace l'ascension de deux gamins inséparables qui insufflèrent la même énergie à leur vie qu'à leur art.
Autoportrait d'un fils, d'un peintre, d'un fou.
" Je suis le fils d'un salopard qui m'aimait. Mon père était un marchand de meubles qui récupéra les biens des Juifs déportés. Mot par mot, il m'a fallu démonter cette duperie que fut mon éducation. À vingt-huit ans, j'ai connu une première crise de délire, puis d'autres. L'enfance et la folie sont à mes trousses. Longtemps je n'ai été qu'une somme de questions. Aujourd'hui, j'ai soixante-trois ans, je ne suis pas un sage, je ne suis pas guéri, je suis peintre. Et je crois pouvoir transmettre ce que j'ai compris. " Un autoportrait bouleversant traversé par l'antisémitisme, les secrets de famille, l'art, la folie et l'amour.
C'est une histoire d'obsession qui anime Patti Smith. Une obsession créatrice, que l'on retrouve sous différentes formes dans cet ouvrage très personnel. De passage à Paris, l'artiste observe tout et absorbe tout. À la manière d'un journal intime, elle retranscrit ses impressions qui viendront nourrir « Dévotion », la nouvelle qui compose le coeur du livre et lui donne son titre. C'est en quittant la capitale à bord d'un train que l'inspiration la saisit. L'histoire d'une jeune fille et de son obsession pour le patin à glace; celle d'un homme à l'intelligence cruelle, obnubilé par sa quête d'objets précieux. L'oeuf au plat parfaitement rond du café de Flore où elle a pris son petit déjeuner la veille se transforme alors en étang gelé. L'esprit libre de Simone Weil dont elle a recherché la tombe quelques jours plus tôt se réincarne dans l'énigmatique personnage d'Eugenia. Dans ce conte poétique et glaçant, Patti Smith revisite le Faust de Goethe au féminin. Enfin, l'auteur achève son voyage en se rendant dans la maison familiale d'Albert Camus, où elle est autorisée à parcourir le manuscrit inachevé du Premier Homme, la rapprochant un instant de l'un de ses grands modèles. Un aperçu émouvant de son processus d'écriture mais aussi une réflexion sur ce qui la pousse à écrire, encore et toujours.
Victime d'inceste, Niki de Saint Phalle révèle un terrible secret enfoui pendant plusieurs décennies. Dans ce court récit écrit à la main, c'est la parole intime de l'une des plus grandes artistes plasticiennes du XXe siècle et « le cri désespéré de la petite fille » qui s'expriment. À l'âge de 64 ans, l'artiste entame ce texte rédigé sous forme de lettre adressée à sa fille Laura. Elle y raconte l'indicible avec des mots simples et poignants. Initialement publié aux éditions de la Différence en 1994. Le livre était introuvable. Cette nouvelle édition est donc très attendue.
« J'ai écrit ce livre d'abord pour moi-même, pour tenter de me délivrer enfin de ce drame qui a joué un rôle si déterminant dans ma vie. Je suis une rescapée de la mort, j'avais besoin de laisser la petite fille en moi parler enfin. Mon texte est le cri désespéré de la petite fille. » N.S.P.
Tout quitter du jour au lendemain pour aller chercher, seule, au fin fond de la Chine communiste, les secrets oubliés de l'art antique chinois, était-ce bien raisonnable ? Fabienne Verdier ne s'est pas posé la question : en ce début des années 1980, la jeune et brillante étudiante des Beaux-Arts est comme aimantée par le désir d'apprendre cet art pictural et calligraphique dévasté par la Révolution culturelle. Et lorsque, étrangère et perdue dans la province du Sichuan, elle se retrouve dans une école artistique régie par le Parti, elle est déterminée à affronter tous les obstacles : la langue et la méfiance des Chinois, mais aussi l'insupportable promiscuité, la misère et la saleté ambiantes, la maladie et le système inquisitorial de l'administration... Dans un oubli total de l'Occident, elle devient l'élève de très grands artistes méprisés et marginalisés qui l'initient aux secrets et aux codes d'un enseignement millénaire.
De cette expérience unique sont nés un vrai récit d'aventures et une oeuvre personnelle fascinante, qui marie l'inspiration orientale à l'art contemporain, et dont témoigne son extraordinaire livre d'art L'Unique Trait de pinceau (Albin Michel).
En dix-huit «stations», Patti Smith nous entraîne dans un voyage qui traverse le paysage de ses aspirations et de son inspiration, par le prisme des cafés et autres lieux qu'elle a visités dans le monde. De la Casa Azul de Frida Kahlo aux tombes de Genet, Rimbaud, Mishima, elle trace un itinéraire flottant au coeur de ses références et de sa vie. Oscillant entre rêve et réalité, passé et présent, Patti Smith nous propose un livre inclassable, profondément sensible et sincère, illustré par les photographies en noir et blanc qu'elle prend depuis toujours, et qui confirme qu'elle est l'une des artistes actuelles les plus singulières et indépendantes.
Qui est vraiment Ai Weiwei ? Pour la première fois, l'artiste contemporain reconnu dans le monde entier et dissident chinois engagé contre la répression se raconte dans ces mémoires fulgurants, de sa jeunesse dans les camps de travail du goulag chinois avec son père Ai Qing, grand poète rejeté par Mao, à son exil en Europe. Comment sa jeunesse et sa vie dans un régime totalitaire lui ont-elles fait prendre conscience de la puissance révolutionnaire de l'art ? Il revient sur les provocations qui lui vaudront d'être emprisonné et sur la permanence de son combat contre les autorités de son pays.1000 ans de joies et de peines offre le récit d'un destin hors norme, un regard sans concession pour comprendre les différentes forces qui ont façonné la Chine moderne et un vibrant plaidoyer en faveur de la liberté d'expression.L'autobiographie de la star de l'art contemporain chinois est un témoignage effarant sur le rôle d'un artiste dans une dictature. Le Monde.Un texte bouleversant. L'Obs.Traduit de l'anglais et du chinois par Louis Vincenolles.
Le rôle de Francis Picabia (1879-1953) fut crucial dans l'histoire de la peinture, et au-delà. C'était un artiste protéiforme, inclassable, cherchant à fuir les positions arrêtées, les modèles établis, toute école, tout dogme. Il fut poète et écrivain comme il fut peintre, c'est-à-dire entièrement, librement, et éprouvant pour ses deux activités majeures la même attraction mêlée de rejet. Car Picabia abhorrait toute forme d'étiquette, de posture, de reconnaissance et ne voyait de meilleure définition de lui-même que son nom (« Je suis Picabia et c'est mon infirmité. »).
Cet héritier, fils de famille bourgeoise aisée et cosmopolite, était un excentrique et un révolté. Provocateur aux goûts de luxe, il fut, toute sa vie, secoué par les contradictions. Un génie charismatique à la puissance créative intarissable. Un inlassable amoureux de la vie, passionné de vitesse (collectionnant les automobiles), affamé de fête et de festins (usant d'alcool et de drogues), recherchant les complicités intellectuelles comme les réjouissances amicales. Mais aussi un dépressif à la vie psychique perturbée, traversant de longues périodes d'abattement, de fuites, de désertions.
Séducteur recherchant l'appui de femmes fortes, il eut une vie amoureuse agitée, et marquée par de grandes expériences. Aucune ne fut comparable à celle qu'il vécut avec sa première femme, Gabriële Buffet. Car ensemble ils bouleversèrent l'histoire de l'art.
Quand ils se rencontrent en 1908, Picabia a trente ans. Il éprouve un coup de foudre pour cette musicienne âgée de trois ans de moins que lui, cette jeune femme supérieurement intelligente (au « cerveau érotique » dit-il), issue d'une famille d'intellectuels. Elève de Vincent d'Indy, de Busoni, amie du jeune Varèse, Gabriële est une audacieuse, passionnée de théorie, tournée vers la modernité et l'esprit d'un temps marqué par les découvertes scientifiques, mais elle ne s'intéresse pas particulièrement à la peinture. C'est en elle pourtant que Picabia, aspirant au changement, mais encore peintre impressionniste (à succès), trouvera l'interlocutrice idéale, celle qui lui permettra de se libérer des conventions, d'opérer sa mue artistique et de devenir bientôt l'auteur de la première toile considérée comme abstraite (Caoutchouc, 1909). D'emblée, leur rencontre se place sous le signe de l'art. Picabia se cherche. Gabriële envisage le pictural sous l'angle musical, comme une pure création de l'esprit, éloignée de toute représentation figurative. « La peinture ne sera jamais plus ce qu'elle avait été », dira Gabriële. Notre « conversation, continue-t-elle, commencée dans un garage s'est poursuivie pendant des jours... des mois, je puis dire jusque sa mort, malgré les séparations, les ruptures de contact et d'idées ».
Picabia et Gabriële vivront ensemble près de quinze ans et ils auront quatre enfants avant de divorcer en 1931. Mais le lien ne s'interrompra jamais. Comme écrivain, Picabia est déjà l'auteur d'une oeuvre importante. Pourtant sa correspondance avec Gabriële, inédite et révélée aujourd'hui avec de nombreux poèmes également inédits, est peut-être le meilleur témoin des pensées et des états d'âme de l'homme, des convictions et des doutes de l'artiste. Au fil des lettres, étalées sur des dizaines d'années, Picabia, parle de son métier et de ses projets, de considérations esthétiques et de mouvements (au rang desquels DADA), des autres peintres (jeunes et moins jeunes, on y croise notamment Picasso, sévèrement étrillé). Mais c'est une manière de vivre plus qu'un programme artistique que Picabia semble vraiment chercher à définir. Dans ces pages, il évoque Dieu, l'amour, la guerre, le communisme, la politique coloniale. Sans jamais renoncer à la drôlerie ni à l'ironie, il se fait volontiers moraliste et multiplie les aphorismes, les traits saillants, dans l'esprit de son modèle en littérature et en philosophie, Nietzsche. Et partout, il laisse éclater son fulgurant talent de poète. Car ici, la plus étonnante poésie, amoureuse, métaphysique, sensorielle, onirique, n'est pas seulement présente dans les poèmes. Dans les lettres, Picabia passe régulièrement de considérations « ordinaires » (sur les déplacements, l'entourage, l'organisation, ou le temps qu'il fait) à la plus extrême profondeur, se rendant absolument transparent, lui et sa vision. Quoi de plus naturel que de se livrer ainsi, et de laisser voir tout « ce qu'il y a dans [son] cerveau » à celle qui fut son inspiratrice, et qui toujours le subjugua par son esprit.
L'art et la vie de Gérard Garouste sont peuplés de fantômes et de hantises. Le peintre livre ici, sans aucun fard, tous les tourments intimes qui ont façonné son parcours : la violence et l'antisémitisme de son père, la dyslexie, l'échec, la folie, la dépression, l'incompréhension. Nous entraînant dans les rouages de la création, cet entretien mené par Catherine Grenier révèle un personnage passionné, cultivé, à la franchise déconcertante et à l'engagement artistique sans faille.
« Il y a une douceur à l'existence, un dire renouvelé, des ombres qui apportent du repos, l'atténuation des angles, la pousse des plantes... ».
Résonnant comme un testament littéraire, cette anthologie est le fruit d'une sélection toute personnelle d'Etel Adnan : Saisons, Mer et Brouillard, Nuit, Surgir, Déplacer le silence, cinq recueils constituant la quintessence de son oeuvre poétique. L'écrivaine y livre ses méditations sur le monde, les mythes, l'histoire, l'amour, le silence, le langage, l'avancée dans l'âge, la contemplation de la nature, la quête de la beauté, la mort ou encore la renaissance. Mêlant poésie, prose et philosophie, elle propose une exploration fragmentaire de la réalité, questionne la condition humaine et tente de concilier la mémoire et le temps.
Née à Beyrouth, Etel Adnan (1925-2021) est une artiste, poète et essayiste libano-américaine mondialement reconnue et érigée en modèle par les poètes et poétesses d'aujourd'hui.
Traduction : Martin Richet, Jérémy Victor Robert, Françoise Despalles, Pascal Poyet et Françoise Valéry.
Comme il l'avait confié à Jaime Sabartés en 1939, Pablo Picasso avait rêvé d'un livre qui «serait le reflet le plus exact de sa personnalité et son portrait le plus fidèle. On y verrait exprimé le désordre qui lui est propre. Chaque page serait un vrai pot-pourri sans la moindre trace d'arrangement ou de composition. [...] Simplicité et complexité s'allieraient comme dans ses tableaux, ses dessins ou ses textes, comme dans une pièce de son appartement ou de son atelier, comme en lui-même».Dans le prolongement de ce désir, la présente édition donne à lire l'ensemble des écrits de Picasso publiés en 1989, auxquels s'adjoignent un grand nombre d'inédits découverts dans l'ancienne collection de Dora Maar, dans des collections privées et celles des musées Picasso (Paris, Barcelone). Composés au crayon noir, en couleurs, à l'encre de Chine, au stylo-bille ou encore au crayon-feutre, ces textes ornent papier à dessin, à lettres, dos d'enveloppe, cartons d'invitation, morceaux de papier journal... Certains sont même gravés, enluminés, lithographiés ou peints, ainsi élevés au rang d'oeuvre d'art.La fascination que continue d'exercer Picasso sur le public rend plus que jamais nécessaire la lecture de ces écrits, souvent méconnus et pourtant indispensables à l'appréhension et à la compréhension de son oeuvre. Cette édition bénéficie des derniers apports de la recherche en cours dans un volume en couleurs, richement illustré d'oeuvres et de manuscrits, et, à la manière d'un parcours muséal, elle permet de s'immerger au coeur du processus créatif de l'un des plus grands artistes du XX? siècle.
Quels sont les pouvoirs de la couleur ? Comment agit-elle sur notre conscience profonde ? Quelle est la situation créatrice de l'homme dans notre société actuelle ?Écrit en 1910 alors que l'artiste venait de peindre son premier tableau abstrait, nourri des observations et des expériences accumulées peu à peu, ce livre compte parmi les textes théoriques essentiels qui ont changé le cours de l'art moderne.
«Conversations» est une série de vingt entretiens donnés par le légendaire compositeur Steve Reich.
Figure de proue du mouvement minimaliste aux côtés de Philip Glass ou Terry Riley, sa musique a influencé nombre de jeunes musiciens, chorégraphes ou artistes.
Il s'entretient ici avec des collaborateurs, des compositeurs, des musiciens influencés par son travail. On retrouve des grands noms tels que Brian Eno, Johnny Greenwood (Radiohead) ou la chorégraphe Anne Teresa de Keersmaeker. Avec eux, il revient sur sa carrière, ses inspirations, son approche de la composition...
Ces discussions libres et sans filtre permettent d'entrer en profondeur dans la vie, la pensée et l'oeuvre de Reich. Et de découvrir ainsi les cheminements par lesquels s'est échafaudée la musique de ce compositeur majeur.
L'oeuvre d'Odilon Redon (1840-1916), précurseur du symbolisme hanté par la folie est marqué par l'onirisme et le mystère. L'Araignée qui pleure est une de ses images les plus célèbres de la série des "Noirs". Durant quinze ans, Redon dessine sans relâche mêlant toute une gamme de techniques afin d'obtenir une surface hétérogène qui vient aimanter le regard et le plonger dans ses abîmes. Puis Redon se consacre à partir des années 1890 à l'exploration des ressources expressives de la couleur, à l'huile et surtout au pastel. Et c'est dans la nature que l'artiste trouve l'impulsion pour se « laisser aller à la représentation de l'imaginaire ». Comme nombre d'adeptes de l'ésotérisme et de scientifiques de son temps, il recherchait les principes premiers derrière la variété des manifestations.
Martial Canterel, un inventeur saugrenu, fait visiter sa somptueuse propriété Locus Solus à quelques-uns de ses amis. Au cours d'une longue promenade, qui pourrait évoquer une sorte d'itinéraire initiatique, l'illustre savant présente en sept étapes chacune des sept merveilles de ce monde qu'il a créées. Ces stupéfiantes trouvailles vont de la demoiselle volante composant une mosaïque au diamant gigantesque dans lequel nage une danseuse à la chevelure musicale, en passant par une vitrine géante où des cadavres sont conservés dans un étrange liquide.Publié en 1914, Locus Solus est une pépite surréaliste qui nous entraîne dans un univers fantasmagorique original.Cet ouvrage occupe une place prépondérante dans l'oeuvre de Raymond Roussel qui, comme l'affirme André Breton, demeure, «avec Lautréamont, le plus grand magnétiseur des temps modernes».
Dans ce texte inattendu écrit en 1921, le peintre suprématiste Kazimir Malévitch se livre à une réhabilitation de la paresse et de l'oisiveté «mère de la vie». Il rappelle que toute civilisation doit tendre à affranchir l'homme du travail, afin de permettre son plein épanouissement.
Né à Pékin dans une famille de grands lettrés chinois, Zao Wou-Ki quitte la Chine d'avant Mao Zedong, après une formation dans la plus grande école des Beaux-Arts du pays où il a aussi été professeur. En 1948, il s'installe pour deux ans à Paris afin d'étudier la peinture française. Il noue à Montparnasse et à Saint-Germain-des-Prés des amitiés indéfectibles et participe ainsi à l'effervescence artistique de l'après-guerre. La découverte de l'abstract painting à New York en 1957 le conforte dans le choix d'une abstraction où se mêlent sa connaissance de la grande peinture chinoise et la liberté du geste désormais acquise. En raison de la prise de pouvoir de Mao, il ne peut revenir en Chine qu'en 1972 et y retourne fréquemment jusqu'en 2008. Cette autobiographie, écrite avec son épouse Françoise Marquet, témoigne de l'inébranlable volonté et plaisir de peindre de Zao Wou-Ki, de ses rencontres artistiques et amitiés exceptionnelles. Elle retrace un chemin créateur hors du commun où se mêlent les influences des abstractions européenne et américaine. Reconnu par la Chine comme leur grand peintre du xxe siècle, Zao Wou-Ki apporte aux jeunes générations d'artistes l'espoir de faire dialoguer les cultures chinoise et occidentale.
Complément biographique de Yann Hendgen.
« Mes amis les oeuvres de vision personnelle seules resteront. Il faut se créer une science picturale personnelle et vibrer devant la beauté comme devant la femme qu'on aime. oeuvrons avec amour, ne craignant pas les défauts, compagnons habituels inévitables des grandes qualités. Oui, les défauts sont les qualités et le défaut est supérieur à la qualité. Qualité signifie uniformité dans l'effort en vue d'atteindre certaines perfections communes accessibles à tous. Le défaut échappe aux perfections uniformes et banales. Le défaut est donc multiple, il est la vie et reflète la personnalité de l'artiste, son caractère, il est humain, il est tout et sauvera l'oeuvre. » Discours prononcé au banquet offert à Ensor par « La Flandre Littéraire », 1922
John Cage rencontre Marcel Duchamp en 1941. Trente après, il confie dans le présent entretien les souvenirs qu'il conserve de cet homme. Et c'est un véritable hommage d'un artiste à un autre artiste et un témoignage drôle et émouvant sur celui qui «prenait le fait de s'amuser très au sérieux». Les oeuvres de ces deux artistes s'offrent l'une l'autre dans un miroir inversé : Cage explique avec une grande clarté avoir voulu développer la dimension physique de l'écoute quand Duchamp voulait réduire cette dimension dans la peinture. Cage rapporte aussi des anecdotes, et notamment la rare fois où Duchamp a perdu son sang-froid, lui d'ordinaire si magnanime : une mémorable partie d'échecs, que Cage aurait dû gagner mais qu'il a perdue, ce qui a mis Duchamp dans une colère noire...
« [...] Pour moi je fais ce que je peux mais que de temps on passe pour n'arriver a` rien. »
« Croyez-moi, si nous voulons que l'art entre chez nous, comme il le doit, il faut débarrasser nos demeures des superfluités encombrantes, qui sont toujours dans le chemin. [...] Si vous voulez une règle d'or, qui convienne à tout le monde, la voici : N'ayez chez vous rien que vous ne sachiez utile ou ne croyiez beau. »
« La lumière répandue à profusion sur toutes choses vous attire, vous ahurit, vous affole. [...] Ici, nos plages sont désertes. L'élégance ne réside que dans les pins qui sortent du sable et dans la délicieuse demi-lune que forme le rivage. Mais que cela est éternellement beau. Et grave ou frivole selon la disposition d'esprit de l'observateur ! » Lettre à Charles Angrand, 18 août 1901.