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Hazan
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« L'artiste doit voir toutes choses comme s'il les voyait pour la première fois. Toute sa vie il doit voir comme il l'a fait quand il était enfant. » Durant sa carrière de peintre, qui a duré près de soixante ans, Henri Matisse (1869-1954) est resté fidèle à ce principe : conserver la fraîcheur du regard, observer chaque chose comme une découverte, laissant ainsi toute sa place à l'émotion. Toutefois, ajoutait l'artiste, « regarder quelque chose comme si nous ne l'avions jamais vu auparavant demande beaucoup de courage » : car si l'instinct lui paraît indispensable, il ne peut s'exprimer qu'à travers un travail permanent, une réflexion constante. C'est donc en conjuguant spontanéité et méthode que Matisse a conduit toute sa création, autour de ce qui a été sa préoccupation essentielle : la couleur. Destinée à bouleverser le regard moderne, son oeuvre s'est exprimée au travers d'une variété de techniques qu'il a toujours cherché à approfondir, à renouveler : peinture, dessin, sculpture, livres illustrés, et jusqu'à cette invention singulière, les gouaches découpées réalisées à la fin de sa vie.
Ce livre rend compte de cette incroyable invention plastique, à travers une cinquantaine d'oeuvres emblématiques, et retrace ainsi dans leur chronologie les incessantes recherches du peintre en ce domaine, depuis la fameuse période « fauve », magnifique explosion de couleurs pures entamée à Collioure, en passant par les somptueuses toiles réalisées sous le soleil du Midi, jusqu'aux ultimes « papiers découpés » qui ont permis au vieil homme de dessiner directement au ciseau dans la couleur. Si certaines influences ont été déterminantes, celle de Cézanne pour commencer, mais aussi plus tard celles de l'Orient, dont il a sublimé les arabesques chatoyantes dans ses Odalisques, ce sont ces nombreux voyages qui ont au fil du temps tissé un véritable métissage de sources d'inspiration. « Vous allez simplifier la peinture », lui avait prédit son maître Gustave Moreau : l'oeuvre de Matisse montre à l'évidence comment son génie s'est exprimé avec une immense liberté, échappant à tout carcan pour exprimer une profonde joie de vivre.
La collection L'ART+GRAND, présentée dans une reliure luxueuse, propose, à travers un texte didactique, de découvrir les plus grands artistes de l'histoire de l'art. Outre une soixantaine de toiles parmi les plus célèbres, l'ouvrage reproduit six tableaux exceptionnels sous forme de DÉPLIANTS grand format qui permettent d'observer ces chefs-d'oeuvre dans les moindres détails. L'ART+GRAND offre ainsi une immersion inédite dans la matière et la touche picturale. -
Klimt : L'art plus grand
Philippe Thiébaut
- Éditions Hazan
- L'art Plus Grand
- 9 Octobre 2024
- 9782754114059
Figure majeure de l'Art nouveau et créateur du mouvement de la Sécession viennoise, Gustav Klimt (1862-1918) est aujourd'hui mondialement célèbre pour son tableau Le Baiser. Cette étreinte éternelle, emblématique de son cycle d'or, symbolise une oeuvre puissamment décorative et novatrice.
Au coeur de la Vienne fin de siècle, capitale d'un empire en déclin, Klimt participe du bouillonnement intellectuel, scientifique et culturel de l'époque, porté par une bourgeoisie qui soutient la création picturale et offre un cadre propice à de nouvelles formes d'expression artistique.
Au travers de ses grandes fresques monumentales, telles que les frises Beethoven et Stoclet, ses portraits féminins sensuels et énigmatiques, marqués par les noms d'Emilie Floge et d'Adèle Bloch Bauer, ou encore ses envoûtantes allégories mythologiques, ses jardins luxuriants et ses paysages oniriques, Klimt ambitionne de réaliser une oeuvre d'art total, unissant peinture, architecture et musique. Il opère alors une véritable révolution stylistique autour de ses thèmes de prédilection que sont la beauté féminine, l'érotisme, la vie et la mort, dans un foisonnement de motifs végétaux et animaliers, de spirales et d'arabesques, de textures précieuses souvent rehaussés à la feuille d'or, dans un entrelacs de lignes courbes et ondoyantes.
Dans sa volonté de briser les conventions artistiques de son temps, Klimt, artiste engagé, a ouvert la voie à de nouvelles formes d'expression artistique, et a su défendre sa conception de l'art moderne qui seul peut sauver l'humanité et la conduire à la connaissance du bonheur.
La collection L'Art plus grand
Cette collection propose une découverte des plus grands artistes de l'histoire de l'art, présentée dans une reliure luxueuse et inédite : composée d'une couverture en vraie toile imprimée dont le motif se prolonge en un jaspage harmonieux, elle crée ainsi une illusion visuelle enveloppante qui donne au livre son caractère précieux et unique. En plus d'une soixantaine d'oeuvres majeures d'un peintre, l'ouvrage reproduit six de ses chefs-d'oeuvre incontournables sous forme de dépliants, qui se déploient en largeur ou en hauteur. Accompagnés d'une notice détaillée, ils permettent de voir l'oeuvre en grand, d'en observer les moindres détails, de s'immerger dans la texture de la matière et dans la touche picturale.
Cet ouvrage consacré à Klimt propose les six dépliants suivants :
La frise Beethoven
Adèle Bloch Bauer
Serpent d'eau (I et II)
Le Baiser
Vierges
La frise Stoclet -
Magritte en 400 images propose une sélection d'oeuvres de René Magritte, des plus emblématiques aux moins connues. Ce choix délibéré vise à surprendre le lecteur et à lui faire découvrir d'autres facettes de l'artiste surréaliste belge en dévoilant des gouaches uniques ou de surprenantes bouteilles peintes.
L'ensemble de la création picturale de René Magritte est présenté en sept chapitres, depuis les premiers tableaux abstraits des années vingt jusqu'aux oeuvres surréalistes majeures des années cinquante et soixante en passant par la période Renoir et la période vache. -
Créé en 1911, L'Atelier rouge d'Henri Matisse est devenu l'une des oeuvres les plus influentes de l'histoire de l'art moderne. Acquise en 1949 par le Museum of Modern Art (MoMA) de New York, où elle est depuis exposée, cette toile représente l'atelier de l'artiste à Issy-les-Moulineaux, en proche banlieue parisienne. Elle montre un espace rempli de peintures, de meubles et d'objets décoratifs. La décision radicale de Matisse de recouvrir de rouge la majeure partie de la surface du tableau a fasciné des générations de chercheurs et d'artistes, mais il restait encore beaucoup à découvrir sur la genèse et l'histoire de l'oeuvre.
Cet ouvrage abondamment illustré accompagne l'exposition consacrée à L'Atelier rouge qui réunit, pour la première fois depuis qu'ils ont quitté l'atelier de l'artiste, les tableaux, sculptures et objets qui y figurent - qu'il s'agisse des trois peintures aujourd'hui conservées au Danemark dans les collections du SMK - Statens Museum for Kunst, dont Le Luxe (II) (1907-1908), ou de pièces moins connues qui n'ont été localisées que récemment.
Publié en français à l'occasion du volet parisien de l'exposition à la Fondation Louis Vuitton, Matisse, L'Atelier rouge propose des analyses d'Ann Temkin, The Marie-Josée and Henry Kravis Chief Curator of Painting and Sculpture au MoMA, et de Dorthe Aagesen, chercheuse et conservatrice en chef au SMK. Ensemble, elles retracent le parcours du tableau de Matisse, de sa commande initiale à son arrivée à New York, en passant par l'historique de ses expositions et de ses propriétaires successifs. Par leurs recherches approfondies et leur lecture attentive, elles transforment notre compréhension de cette oeuvre clé de l'art du XXe siècle. -
À travers une sélection d'une trentaine de poèmes de Paul Éluard, illustrés de dessins de Picasso, ce livre rend hommage à ces deux immenses artistes du XXe siècle, à leur engagement pour la paix, universelle et plus que jamais nécessaire.
Née au milieu des années 1920, en plein mouvement surréaliste, l'amitié de Paul Éluard et de Pablo Picasso prend une nouvelle dimension en 1935, pour connaître dix-sept années d'échanges sans ombre, jusqu'à la mort d'Éluard en 1952. Ce sont la guerre civile espagnole et la tragédie de Guernica qui ont cimenté leur engagement commun contre le nazisme et le fascisme, pour la liberté des peuples et pour la paix. Cet engagement trouve son ultime expression en 1951 dans Le Visage de la paix, le seul ouvrage né de leur collaboration. Les variations de Picasso sur le thème de la colombe - qui accède alors à son statut universel de symbole - y dialoguent avec les courts poèmes d'Éluard, dont la simplicité tendre renoue avec celle des Poèmes pour la paix que son pacifisme lui avait inspirés à la fin de la guerre de 1914-1918. Des poèmes d'Éluard de diverses époques complètent ce recueil qui met en lumière l'engagement pour la paix de deux artistes parmi les plus importants du xxe siècle.
Pour la première fois en grand format et doté d'un jaspage bleu uni, cet ouvrage met en valeur le dialogue entre les mots d'Éluard et les dessins de Picasso, leur communauté d'esprit, et magnifie cette rencontre entre deux immenses artistes. -
Les fables de La Fontaine illustrées par Chagall
Ambre Gauthier
- Hazan
- 6 Septembre 2023
- 9782754113328
« Une de mes plus tenaces ambitions d'éditeur avait été de publier les Fables de La Fontaine dignement illustrées. C'est au peintre russe Marc Chagall que je demandai l'illustration du livre. On ne comprit pas ce choix d'un peintre russe pour interpréter le plus français de nos poètes. Or c'est précisément en raison des sources orientales du fabuliste, que j'avais songé à un artiste à qui ses origines et sa culture rendaient familier ce prestigieux Orient. Mes espérances ne furent pas déçues : Chagall fit une centaine de gouaches éblouissantes ».
Ambroise Vollard, Souvenirs d'un marchand de tableaux, Paris, 1937 Ainsi se souvient Ambroise Vollard, le célèbre marchand d'art qui, en 1926, confie à Marc Chagall ce projet.
L'artiste réalise une centaine de gouaches en couleurs pour préparer le travail de gravure en noir et blanc, s'inspirant de sa culture russe et de la richesse des paysages français. Bien plus qu'un projet éditorial, cette commande est pour Marc Chagall un passeport vers la France, qui l'inscrit dans les pas des artistes et des écrivains français.
Cet ouvrage célèbre ce dialogue entre deux artistes exceptionnels, La Fontaine, styliste éblouissant et moraliste de la nature humaine, et Marc Chagall, qui livre sa vision onirique et personnelle des Fables, nourrie par les paysages enneigés de Vitebsk et par un animisme hérité des traditions hassidiques d'Europe de l'Est, ponctuée des couleurs et des atmosphères de la Bretagne, de l'Auvergne et du Midi de la France.
À travers une soixantaine de gouaches, accompagnées pour la première fois de leurs gravures, cet ouvrage grand format doté d'un jaspage rend hommage à cette rencontre originale. Il est complété d'une introduction qui relate la genèse et le sens de ce dialogue artistique.
Ouvrage réalisé avec l'aimable collaboration de l'association des amis de Marc Chagall : marcchagall.com -
Le 31 mai 2023, Ellsworth Kelly (1923-2015) aurait eu 100 ans. A partir de l'observation de son environnement direct, il a redéfini l'abstraction dans la seconde moitié du XXe siècle, conduisant ses formes épurées, aux couleurs souvent éclatantes, au-delà des attendus de la peinture et de la sculpture.
Près de dix ans après sa disparition, ses oeuvres exercent toujours la même fascination, par leur intensité et leur équilibre, la qualité de leurs adresses visuelles, les espaces qu'elles créent, leur sensualité paradoxale exprimée dans la rigueur. La Fondation Louis Vuitton a la chance de témoigner quotidiennement de cela grâce à la présence dans son auditorium d'une installation pérenne, une des toutes dernières réalisations de l'artiste.
Cet ouvrage offre une introduction et un panorama de son oeuvre, à l'image de l'exposition qu'il accompagne et qui se tient à la Fondation Louis Vuitton du 7 mai 2024 au 9 septembre 2024. Première exposition en France à aborder son oeuvre avec un spectre chronologique aussi large, elle est composée de plus de centaine d'oeuvres, peintures, dessins photographies et collages. Comme elle, ce livre permet d'appréhender pleinement le travail accompli par l'artiste. Ses travaux sont reproduits ici accompagnées d'études de familiers de son oeuvre (Jean-Pierre Criqui, Suzanne Hudson) ou d'apports sur des aspects moins connus (Corey Keller sur la photographie, Alex da Corte sur la liberté se son oeuvre, Sarah Rogers sur sa réception au Moyen-Orient). Il comporte aussi une chronologie richement illustrée. Peter Eeleey y revient notamment sur le séjour décisif de Kelly en France dans l'immédiate après-guerre, son apport à la scène américaine au tournant des années 1950 et 1960. Et plus en aval, il suit le développement et les ramifications complexes d'une oeuvre abordant toutes les échelles de la perception, du trait sur une feuille, à l'intervention dans l'espace architectural. -
Dans ce livre, Anne de Staël, fille aînée du peintre, rassemble ses souvenirs d'enfant augmentés d'une réflexion originale sur le rapport du dessin au tableau.
Les moments de vie évoqués étaient toujours mêlés à l'urgence et à l'intensité de l'expression picturale. Il ne s'agit donc pas ici d'une analyse d'historienne de l'art, mais du regard d'une enfant qui a grandi auprès de cette peinture et qui, devenue adulte, a cherché à dénouer le mystère de la création dont elle a été en partie témoin.
Jusqu'ici, le lien entre le trait du dessin - encre de Chine, fusain, mine de plomb - et la densité de la couleur n'avait jamais été aussi clairement établi.
Dans une langue toujours poétique, l'auteur a voulu montrer comment le travail du dessin dans l'oeuvre de Nicolas de Staël sous-tend la couleur. Le peintre est en effet l'un des plus grands coloristes de la peinture du XXe siècle, et nous découvrons ici l'importance de son travail de dessinateur. L'entrelacement des noirs et des blancs a aussi permis d'exalter la lumière au coeur du pigment. Devant un tableau, Anne de Staël fait surgir ses souvenirs, conséquence de l'émotion esthétique reçue. L'ouvrage est richement illustré, et la fille de l'artiste nous livre un texte à la fois poétique et personnel enrichi de lettres et d'écrits du peintre, nous permettant de redécouvrir l'ensemble de l'oeuvre de Nicolas de Staël. -
Artiste et muse des surréalistes, Lee Miller s'est formée aux côtés de Man Ray et, ensemble, ils ont mis au point la technique de la solarisation. Elle travaille en tant que photographe de mode et portraitiste à Paris, New York ou encore Londres. En 1942, fait rare pour une femme, elle parvient à se faire accréditer par l'armée américaine et capture des images du Blitz à Londres, où elle a pris la tête du service photo du Vogue britannique.
Durant l'été 1944, elle devient l'une des cinq photoreporters femmes connues lors de la Seconde Guerre mondiale. Ses photos et ses articles sont publiés dans le magazine Vogue, éditions américaine et britannique.
Débarquée le 12 août 1944 à Omaha Beach, le 13, elle arrive à Saint-Malo pour réaliser un reportage sur le service des Affaires civiles, la ville est alors assiégée. C'est ainsi qu'elle devient la seule correspondante de guerre en Europe sur le front. Munie de son Rolleiflex, elle va partout où elle le peut, parle aux habitants et sert d'interprète (elle a vécu plusieurs années en France avant-guerre) ; elle suit la progression des troupes et enregistre des photos capitales - notamment le bombardement au napalm de la cité d'Aleth, images que le Vogue britannique choisit de ne pas montrer, puis de la libération de la ville. En cinq jours environ, Lee prend environ 300 clichés de Saint-Malo, mais aussi de Cancale, Dinard, Dinan et Rennes, et rédige des textes qui accompagnent son reportage, constituant ainsi un témoignage exceptionnel. -
Japoniste obsessionnel, intimiste espiègle, impressionniste tardif, nudiste voluptueux, greffier mélancolique du quotidien et de la fuite du temps... Les tentatives visant à résumer Pierre Bonnard (1867-1947) d'un mot ou d'une formule ont toutes échoué. On croit aussi le grandir en faisant de Matisse et de Mark Rothko, peintres de l'ivresse solaire, ses héritiers directs.
Il y a du vrai dans toutes ces approches, l'erreur est de les opposer ou de réduire cet artiste génial à l'évidente séduction de ses tableaux. Bonnard fut bien plus que l'observateur malicieux ou sensuel des moeurs bourgeoises, cultivant un hédonisme confortable, apte à fidéliser une clientèle vite internationale.
Sans ignorer le charme que lui reconnaissait Renoir, ce livre fait le pari d'un artiste autrement ambitieux et plus profondément ancré aux deux siècles qui furent les siens. Voilà un peintre, un photographe, et très vite un décorateur aux mille prouesses, qui s'élance au temps des attentats anarchistes, devient un des piliers de la Revue blanche et un acteur de l'Affaire Dreyfus au côté d'Alfred Jarry, avant de se lier à Ambroise Vollard et à la galerie Bernheim-Jeune, et traverser, en triomphe, les folles années 1920, le Front populaire et l'Occupation.
Suivre sa carrière, c'est aussi communier avec le bocage normand et les pentes du Cannet, se pencher sur ses liens avec le monde politique, observer le flux des commandes, et le cours de ses tableaux. Sa vie elle-même, au-delà des femmes qu'il a tant aimées et si bien glissées dans ses toiles, méritait un examen plus approfondi. L'homme et l'oeuvre, au terme d'une enquête qui ne les sépare jamais, justifient pleinement la thèse de l'ouvrage : n'en déplaise à Picasso, Bonnard, soucieux de la beauté du monde, fut l'un des grands inventeurs de l'art français. -
Durant l'été 1944, Matisse se décida à illustrer Les Fleurs du mal de Baudelaire, comme il en fit de même pour Mallarmé, Ronsard, Charles d'Orléans et bien d'autres. Il dessina 34 visages au crayon gras, compositions qui viendront orner l'édition de 1947, publiée par La Bibliothèque française. Les cent cinquante ans qui nous séparent de la première édition des Fleurs du mal n'ont fait qu'en confirmer la valeur inaugurale et l'impact sur les artistes. En 1857, il s'agissait pour le poète de se délester du vieux romantisme, trop idéaliste, de traduire l'esprit du temps, ce qu'il appelle « la modernité », et d'explorer la face sombre de sa propre conscience, condamnée aux limites et aux plaisirs d'une époque désenchantée.Personne n'osa se lancer dans l'illustration d'un tel livre, au sortir du procès qui le frappa à sa sortie. Mais la vraie raison du silence des artistes tient à la difficulté même de doubler une telle poésie, peu descriptive et impropre au pittoresque, par l'image. Il fallait des tempéraments tels que Rodin ou Rouault pour s'y atteler. Matisse avait connu le second alors qu'ils fréquentaient tous deux l'atelier de Gustave Moreau, à la fin des années 1890. Sans doute le désir d'associer son nom et son trait à l'univers de Baudelaire remonte-t-il assez haut. Il se réveille dans l'entre-deux-guerres et commence à se concrétiser sous l'Occupation, moment où Matisse se retourne sur sa vie, qui a failli lui échapper. D'où la coloration sensuelle et nostalgique de ces visages de femmes, alternativement graves, rieurs ou félins, selon la teneur des textes qu'ils accompagnent plus qu'ils ne les illustrent. Un rapport d'harmonie, et non de plate adéquation, règle dessins et purs effets graphiques. Le choix des poèmes qu'il retient, moins d'un tiers de l'édition de 1868, procède de l'érotisme et de la créolité que Matisse et Baudelaire partagent. Ils avaient en commun l'expérience du voyage exotique, l'île Bourbon pour le poète, Tahiti pour le peintre, et furent tous deux sensibles à la beauté noire. Ce livre, longtemps caressé, ouvre une fenêtre très féminine sur l'esthétique et la psyché de l'artiste lettré, parvenu au seuil des papiers découpés et de son ultime explosion orientaliste.Cette version luxueuse à petit prix du fac-similé de l'édition de 1947 est accompagnée d'un essai introductif rédigé par Stéphane Guégan éclairant les choix de Matisse et les liens qui unissent le poète et le peintre.
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Cet ouvrage propose une expérience inédite : présenter dans l'espace éblouissant du musée Picasso d'Antibes douze oeuvres magistrales de Joan Miró, issues d'une des plus importantes collections privées au monde, la collection Nahmad. Miró est chez lui dans ce musée, comme l'est un hôte dans la maison de son ami. Car l'amitié qui, depuis leur première rencontre à Paris en 1920, lia les deux artistes pendant toute leur vie, fut aussi un ferment de leur passion de création. L'ouvrage présente une seule oeuvre, parfois deux, dans la belle lumière des salles du château Grimaldi.
À rebours d'un catalogue d'exposition traditionnel qui réunit et associe, il est là non plus question d'accumulation, mais de concentration et de réception de l'objet dans sa singularité pour la contemplation et l'interprétation. Chaque page est alors l'écrin d'un seul motif de méditation, ou d'un dialogue subtil, pour offrir les conditions optimales au regard qui, sans hésiter et sans avoir à choisir, se pose sur le tableau pour mieux le voir et l'entendre. Il s'agit ici de rendre compte non d'une exposition, mais plutôt d'une installation dans l'espace changeant des galeries du musée, pour une rencontre originale entre une oeuvre et une architecture, un voyage insolite en douze étapes pour partager l'exacte beauté de ces peintures nous révélant « le sens magique des choses ». -
Gabriele Munter & Eudora Welty : Au début, la photographie
Isabelle Jansen, Gilles Mora
- Éditions Hazan
- 3 Juillet 2024
- 9782754117036
Catalogue officiel de l'exposition « Gabriele Münter & Eudora Welty. Au début, la photographie » au Pavillon Populaire de Montpellier du 26 juin au 29 septembre 2024.
Gabriele Münter (1877-1962) et Eudora Welty (1909- 2001) sont deux femmes - artistes majeures du XXe siècle : Gabriele Münter est un peintre reconnu, affiliée au groupe pictural d'avant-garde « Le Cavalier Bleu » et longtemps la compagne de Vassily Kandinsky. Eudora Welty, elle, est reconnue comme un des plus talentueux des écrivains sudistes américains.Avant d'être engagées dans la pratique intensive et passionnée de leurs mediums respectifs, la peinture et la littérature, Münter et Welty se sont d'abord investies dans celle, intensive et passionnée, de la photographie.
Plus qu'un simple hobby, la photographie - pratiquée chez ces deux femmes à l'aube de leurs carrières - annonce, le développement à venir de leurs futurs champs artistiques. Une telle similitude active sur un territoire photographique commun (le Sud-Est des États-Unis), ne peut que nous étonner et nous interroger.
L'exposition montrera environ une soixantaine de tirages pour chacune des deux artistes. -
Quand un artiste parvient à imposer sa vision du monde, du monde extérieur comme de son monde personnel et imaginaire, quand il réussit peu à peu à tout rassembler en un ensemble cohérent, ses sujets, sa technique, sa gamme de couleurs, ses compositions, ses angles de vue et ses audaces, alors tous ses tableaux en viennent à s'ancrer en nous, à nous accompagner dans notre vie de tous les jours - déjeuners en famille à la campagne, jeux en plein air et en plein soleil, paysages de Normandie ou du Midi mi-réels mi-paradisiaques, grands nus de sa compagne et modèle Marthe... Alors, face à un ciel rose et mauve du soir, devant des nuages d'orage qui se découpent sur du violet, du jaune et du vert, on dit, un peu impressionné : « Regarde, c'est un Bonnard !» La forme originale de ce coffret permet d'explorer et de contempler l'art de Bonnard : accompagné d'un livret explicatif comprenant une introduction et des commentaires d'oeuvres, ce livre «en accordéon», tout en images, déploie une soixantaine de tableaux de l'un des grands maîtres de la couleur au XXe siècle.
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Monet Mitchell : les couleurs de la lumière
Collectif
- Éditions Hazan
- Catalogue D'exposition
- 5 Octobre 2022
- 9782754112833
Le catalogue de l'exposition « Monet Mitchell », organisée à la Fondation Louis Vuitton en partenariat avec le musée Marmottan Monet, explore les correspondances entre les oeuvres tardives de Claude Monet (1914-1926), qui anticipent les débuts de l'abstraction, et les peintures de Joan Mitchell (1925-1992).
Peintre américaine issue de l'expressionnisme abstrait, Joan Mitchell voyage en France dès 1948 et s'installe en 1968 à Vétheuil, lieu d'inspiration où vécut aussi Monet de 1878 à 1881.
Les chefs-d'oeuvre et les essais ici réunis soulignent les points de convergence liés à la couleur, à la lumière, à la gestualité, à la nature et aux paysages de Giverny et Vétheuil, qui ont profondément inspiré les deux artistes. -
- Les racines russes de Nicolas de Staël, sa formation d'architecte, l'influence du Sud sur son oeuvre, les ferments de son exceptionnelle recherche poétique et plastique ; L'ouvrage le plus documenté en illustrations et pour ce qui concerne son oeuvre graphique : plus de 300 planches.
Derrière la légende du peintre Nicolas de Staël (1914-1953), suicidé à l'âge de 41 ans par soif d'absolu, dans son combat avec la peinture, il y a un l'artiste, un oeil et une culture vivace. On ne comprend pas Nicolas de Staël si l'on ne prend pas en compte la synthèse, unique dans l'art européen de son temps, entre le prisme pictural nordique et le prisme pictural byzantin méditerranéen : voici la grille de lecture qui éclaire le regard de Jean-Claude Marcadé tout au long de cette monographie aux perspectives très neuves. « Je crois qu'il faut croire à la lumière de la connaissance, je veux dire qu'il faut en savoir l'intensité quoi qu'on fasse », a écrit de Staël. Marcadé voit un lien essentiel entre l'énergie sublimée de la couleur dans l'icône, quelle que soit l'école, et les unités colorées de nombreux tableaux de Nicolas de Staël, tout particulièrement dans l'ultime phase de sa création et, plus spécialement, dans la transparence texturelle du prétendument inachevé Le Concert (mais l'art ne l'est-il pas dans son être, au-delà des perfections formelles ?). Pour lui, l'iconique flamboie dans son authentique visée : l'au-delà de la représentation, la visibilité apparaissant au sein de l'invisibilité, venant à la naissance à travers elle. En d'autres termes : l'abstraction essentielle faisant se manifester, se révéler les objets et les êtres. Sans parler des « rouges staëliens dans leur sublime simplicité, ces rouges de toutes les nuances, des sourdes aux transparentes, des carmins, des cramoisis aux pourpres et aux vermillons, ces rouges ont la même énergie que dans la peinture d'icône orthodoxe ». Et pourtant, dans son art, Nicolas de Staël apparaît, à première vue, parmi les génies issus de l'Empire russe, comme le plus « français ». Ses premières abstractions sont, certes, pleines de violence, mais il saura se plier à la discipline française. On ne saurait cependant le réduire à ça : c'est l'apport capital de la lecture novatrice que nous propose Jean-Claude Marcadé ici que de restituer l'impact de Ravenne, de la Catalogne et de la lumière de la Sicile dans l'art fulgurant de cet artiste qui est passé dans le ciel de la peinture telle une comète. Une iconographie exceptionnelle de plus de 300 oeuvree est réunie ici avec, pour la première fois, une présentation de l'oeuvre graphique substantielle. -
« Livre orgiaque, sans trop de mélancolie », aux dires de son auteur, Parallèlement met en scène les amours et les haines de Verlaine, sa double nature de pécheur et de chrétien convaincu, sa double identité sexuelle aussi. Celui qui avait été l'amant de Rimbaud, le temps d'une saison infernale, publie une manière de portrait intime en 1889, non sans craindre la censure. Onze ans plus tard, Verlaine étant mort entre-temps, Vollard et Bonnard, le marchand et le peintre, donnent une seconde vie au livre, choisissant avec soin format, papier et typographie, ainsi qu'une illustration somptueuse, tirée en rose à dessein. Sans jamais trahir le texte et sa façon piquante de mobiliser les sens, Bonnard laisse ses motifs, femmes entrelacées, corps lascifs, faunes exténués ou personnages de Watteau, sortir des marges, envahir la page, culbuter les vers imprimés. Ce sommet du livre d'artiste reparaît tel quel, dans un coffret qui rend hommage à cette rencontre originale, à ce dialogue artistique, accompagné d'un livret explicatif qui se penche autant sur la verdeur poétique de Verlaine qu'il explore l'éros inventif de Bonnard.
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Giorgio de Chirico, la peinture métaphysique
Paolo Baldacci
- Éditions Hazan
- 9 Septembre 2020
- 9782754111355
L'exposition Giorgio de Chirico. La peinture métaphysique au musée de l'Orangerie, du 16 septembre au 14 décembre 2020, retrace le parcours et les influences artistiques et philosophiques qui ont nourri l'artiste Giorgio de Chirico de Munich à Turin, puis à Paris où il découvre les avant-gardes picturales de son temps et enfin à Ferrare. De manière inédite, seront mis en lumière les liens du peintre, découvert par Apollinaire puis soutenu par le marchand Paul Guillaume, avec les cercles culturels et littéraires parisiens. Né en Grèce et formé dans le creuset de la culture classique et du romantisme allemand tardif, De Chirico développe les fondements d'une nouvelle conception artistique aux côtés de son frère cadet Alberto Savinio. Elève à l'Académie des Beaux-Arts de Munich à partir de 1908, il découvre la pensée de Nietzsche et Schopenhauer ainsi que les oeuvres de Bocklin et de Klinger. Après un passage à Milan puis Florence, c'est cependant depuis la France, à Paris dès l'automne 1911, qu'il met en place un vocabulaire plastique singulier au contact des révolutions picturales modernistes. Il est très vite remarqué par certaines personnalités artistiques de son temps. Guillaume Apollinaire, Maurice Raynal et André Salmon, mais aussi André Breton, Paul Éluard, Jean Paulhan, sont parmi les premiers à s'intéresser à son oeuvre et à la promouvoir.
L'exposition trouve ainsi toute sa place au musée de l'Orangerie autour de la figure de Paul Guillaume qui fut le tout premier marchand de Giorgio de Chirico. De retour en Italie en 1915, il est envoyé avec son frère Savinio à Ferrare pour des raisons militaires et y poursuit ses recherches picturales. La période ferraraise (juin 1915-décembre 1918) est l'occasion pour les peintres Carlo Carrà et Giorgio Morandi de fréquenter les deux frères permettant ainsi la formation de ce que l'on qualifiera plus tard d'"école métaphysique" et sur laquelle se clôt l'exposition. -
En collaboration avec le Musée d'Art Moderne de Paris, l'Hôtel de Caumont-Centre d'art d'Aix- en-Provence, propose une exposition consacrée à l'oeuvre de Raoul Dufy (1877-1953). Riche d'une centaine d'oeuvres (peintures, dessins, aquarelles et céramiques) majoritairement issues du Musée d'art Moderne de Paris, mais également de plusieurs collections publiques et privées, cette exposition explore toutes les périodes de l'artiste, en mettant particulièrement à l'honneur les liens étroits que Dufy entretenait avec l'oeuvre de Cezanne de 1908 à 1914.
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L'expressionniste autrichien Egon Schiele, mort en 1918 à l'âge de vingt-huit ans, a - malgré la brièveté de sa carrière - laissé une oeuvre prolifique composée de plusieurs centaines d'huiles mais surtout de près de trois mille dessins et aquarelles. Cette part de son oeuvre, de premier plan, n'a jamais été mise en pleine lumière.
Les difficultés d'accès à ces oeuvres fragiles, dispersées dans de multiples musées et collections privées, expliquent que l'on ai eu rarement l'occasion de les voir réunies. Ce livre, qui illustre un grand nombre d'oeuvres sur papier de Schiele, offre une possibilité unique de suivre l'évolution rapide de ce dessinateur hors pair au cours de ses douze années d'activité.
Jane Kallir, auteur du catalogue raisonné de Schiele, présente la production de l'artiste année après année et analyse les étapes successives de sa progression, depuis le dessinateur prodige qu'il fut enfant jusqu'au maître de la forme et de l'expression qu'il est devenu à la fin de sa courte vie.
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Catalogue officiel de l'exposition Picasso bleu et rose au musée d'Orsay du 18 septembre 2018 au 6 janvier 2019. Le musée d'Orsay et le musée national Picasso-Paris organisent une manifestation exceptionnelle consacrée aux périodes bleue et rose de Pablo Picasso. Pour la toute première fois en France, cette période essentielle de la carrière de l'artiste est traitée dans son ensemble.Cet ouvrage propose une lecture renouvelée des années 1900 - 1906 de Picasso, en réunissant des chefs d'oeuvres, pour certains jamais présentés en France, ainsi qu'un ensemble important de peintures, de dessins, et la totalité de la production sculptée et gravée de l'artiste.
La présentation de cette exposition au musée d'Orsay manifeste la volonté d'inscrire le jeune Picasso dans son époque. Ses différentes productions sont ainsi remises en contexte avec le travail de ses contemporains ou prédécesseurs, espagnols et français (Casas, Nonell, Casagemas, Steinlen, Degas, Toulouse-Lautrec ou Gauguin).
Cette exposition sera ensuite présentée à la Fondation Beyeler à Bâle du 3 février au 26 mai 2019. -
Bonnard. Peindre l'Arcadie a pour ambition de faire découvrir d'une manière différente un peintre mondialement connu et apprécié pour la magnificence de ses couleurs, la radicalité de ses visions et son humour décalé à la Jarry. Articulé autour des fondamentaux de la peinture de Bonnard, cet ouvrage cherche à éviter l'écueil d'une démonstration strictement chronologique pour faire sentir l'unité profonde de l'oeuvre, la manière dont l'artiste a su additionner harmonieusement les différentes phases de sa création. Du tableautin au grand format, du portrait à la nature morte, de la scène intime au sujet pastoral, du paysage urbain au décor antique, l'oeuvre de Bonnard nous révèle un artiste instinctif et sensible. Sa palette aux couleurs vives et lumineuses en fait l'un des principaux acteurs de l'art moderne. Coédition Musée d'Orsay/Editions Hazan
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Catalogue officiel de l'exposition Soulages.Papiers au Musée Picasso d'Antibes qui a eu lieu du 2 avril au 26 juin 2016. Pierre Soulages est reconnu comme l'une des figures majeures de l'abstraction. Ses tableaux noirs ont été exposés dans les plus grands musées du monde. Mais c'est tout particulièrement à son oeuvre sur papier - à l'origine domaine réservé de l'artiste pour expérimenter de nouvelles pistes de recherches - que veut rendre hommage le musée Picasso d'Antibes.
Cette exposition a assemblé un certain nombre de papiers provenant de collections publiques et privées, également du musée Soulages de Rodez, ou encore conservés par l'artiste et dévoilés au public pour la première fois. Pierre Soulages (né le 24 décembre 1919 à Rodez), « peintre du noir et de la lumière », est reconnu comme l'une des figures majeures de l'abstraction.
Sa carrière artistique débute en 1947, avec une première exposition à Paris, au Salon des Surindépendants, où il présente des toiles abstraites. Ces oeuvres, aux tonalités sombres, attirent l'attention de Picabia qui lui prédit : « Avec cela, vous allez vous faire beaucoup d'ennemis. » Picabia se trompait.
Après plus de soixante-cinq ans de création, Soulages s'est imposé comme le plus grand peintre de la scène française actuelle, comme l'un des principaux représentants de la peinture informelle. Ses tableaux noirs (un noir qu'il appelle « noir-lumière » ou « outrenoir ») ont été exposés dans les plus grands musées du monde. A 96 ans, Pierre Soulages poursuit son oeuvre.
Mais c'est tout particulièrement à celle sur papier que veut rendre hommage le musée Picasso d'Antibes, à travers cette exposition et son catalogue qui l'accompagne. Car à côté de sa pratique de la peinture sur toile, Pierre Soulages, depuis ses débuts, développe une oeuvre parallèle et complémentaire sur papier, que ce soit en utilisant le fusain, le brou de noix, la gouache, l'encre, l'acrylique ou le graphite. « C'est avec les brous de noix de 1947 que j'ai pu me rassembler et obéir à une sorte d'impératif intérieur. La vérité est que je me suis senti contraint par l'huile. Je l'avais pratiquée avant guerre et je ne savais ce qu'elle imposait comme contraintes. Par impatience, un jour, dans un mouvement d'humeur, muni de brou et de pinceaux de peintre en bâtiment, je me suis jeté sur le papier. » Ce travail sur papier était à l'origine le domaine réservé de l'artiste pour expérimenter de nouvelles pistes de recherche. La donation en 2005 au musée de Rodez de plus d'une centaine de dessins a révélé au grand public l'extraordinaire diversité de cette production. -
La peinture d'avant-garde peut-elle assumer une totale autonomie formelle au risque de faire l'impasse sur la culture de masse ? Ainsi se pose un des dilemmes du modernisme au xxe siècle. Pour Robert Delaunay (1885-1941), acteur majeur de l'avant-garde, la réponse est sans équivoque : pressentant la nécessité de ne pas enfermer la peinture moderne dans une quête anti-illusionniste, il s'emploie à articuler réalisme (mimesis) et abstraction (aisthesis). Précurseur du pop dans L'Équipe de Cardiff en 1913, il est aussi l'un des premiers peintres abstraits de sa génération, avec la série des Formes circulaires conduisant au Disque.
L'analyse des sources de L'Équipe de Cardiff (cartes postales, magazines illustrés, affiches, sports, mode, aviation, etc.) et leur inscription dans les débats esthétiques de l'époque montre combien Robert Delaunay réconcilie deux filiations opposées de l'historiographie classique de l'art moderne : « peinture pure » versus « peinture pop ». À partir de cette oeuvre-manifeste, l'essai de Pascal Rousseau renouvelle l'approche du peintre que l'on cantonne, trop volontiers, à un orchestrateur décoratif de la couleur. C'est sous-estimer les intuitions de sa recherche pionnière sur le statut de l'artiste, de l'image et de l'abstraction à l'ère du consumérisme cosmopolite du premier xxe siècle.
Comment Delaunay fait-il entrer dans sa peinture, et partant dans l'art de son temps, la publicité, le culte du muscle, la carte postale et le sens du vertige, comment contribue-t-il à une théorie visuelle du contemporain fondée sur une pensée des médias ? C'est ce que Pascal Rousseau nous apprend, s'appuyant sur un corpus d'images jamais rassemblées, dans une langue à la fois savante et accessible.