C'est la décennie de l'audace, des toiles expressionnistes, des livres au graphisme créatif, des oeuvres d'art totales du Bauhaus, des débuts de la psychologie, des bals de travestis, des cabarets et du cinéma. Entre les tensions de deux guerres mondiales, Berlin dans les années 1920 était une capitale à l'apogée de sa nonchalance, débordant d'art, d'innovations et d'idéaux.
Cet ouvrage plonge ses lecteurs dans l'esprit libre de la période de Weimar. À travers des oeuvres emblématiques, puisées dans la peinture, la sculpture, l'architecture, le design graphique, la photographie et le cinéma, nous sont dévoilées les innovations, les idées et les folles utopies qui caractérisent cette vitrine culturelle unique. On entre dans les bars jazz et les salles de danse, on adopte la mode à la garçonne et on découvre les « kinos » remplis de spectateurs, on suit les avancées technologiques et les progrès des modes de transport, depuis les tours de radio aux roulements des trains et tramways, en passant par les gratte-ciel vertigineux, sans oublier les chefs-d'oeuvre cinématographiques et la nouvelle indépendance conquise par les femmes qui les autorise à fumer des cigarettes, à porter les cheveux courts et à gagner leur vie par leurs propres moyens.
Parmi les oeuvres de cette évocation culturelle vivante figurent Les Journalistes de Hannah Hoch, les Mains sur la machine à écrire de Lotte Jacobi, le Portrait de la journaliste Sylvia von Harden d'Otto Dix, le projet pour l'Alexanderplatz de Peter Behrens et L'Ange bleu de Josef von Sternberg, avec Marlene Dietrich dans le rôle de Lola Lola, la chanteuse de cabaret.
Au fil des pages et des années, on découvre à la fois la soif d'utopie et les réalités économique et politique, plus ambiguës, qui ont nourri des chefs-d'oeuvre de divertissement, idéalistes ou réactionnaires produits durant cette période. Derrière les lumières vives et les robes pailletées se cachent l'inflation, le travail à la chaîne et un consensus politique fragile que dissimulent ces années bénies et qui annoncent finalement une issue brutale amorcée par la montée du national-socialisme.
Pour l'artiste biélorusse Marc Chagall (1887-1985), la peinture formait une trame complexe, tissée de rêves, de contes et de traditions. Son langage visuel, immédiatement reconnaissable, s'est forgé une place unique au début du XXe siècle et est souvent reconnu comme précurseur en matière d'expression de la vie psychique.
Dans les toiles de Chagall, le pinceau se pose en touches libres, les couleurs, dont le bleu qu'il affectionne particulièrement, sont profondes et l'on remarque tout un répertoire de figures récurrentes tels que musiciens, coqs, toits, fleurs et amoureux en suspension dans le ciel. Ses compositions au charme éthéré sont souvent complexes, riches en références. Elles mêlent non seulement les couleurs et les formes, mais évoquent aussi ses racines juives et ses rencontres faites à Paris, de même que sa foi, révélée à travers des gestes d'amour et des symboles d'espoir, fait écho aux signes de traumatisme.
Cette introduction de référence à l'artiste explore les multiples formes que prend le vocabulaire perfectionné de Chagall. Entre les scènes de naissance, d'amour, de mariage et de mort, depuis les représentations de la Tour Eiffel jusqu'à celles de Vitebsk, sa ville natale, cet ouvrage rend hommage à un style unique, aussi gracieux à l'oeil qu'enchanteur pour l'imagination.